La promenade du bOeuf gras selon un témoin

Tout commençait par un concours d'animaux qui se déroulait invariablement pendant la semaine précédant Pâques. Deux à  trois bêtes étaient réunies par leurs éleveurs sur la place Turgot, devant les anciens abattoirs. Les plus belles recevaient des prix, par catégories. Car il n'existait pas un seul bOeuf gras mais plusieurs. Jean-Pierre Poulet a même vu des cortèges de quinze bOeufs faire " la promenade", qui, à  l'époque, était organisée par l'association de bouchers "Le ventre de Clermont ". "On décorait les bêtes avec des rubans et des cocardes tricolores ", raconte-t-il. Au départ du cortège, elles bougeaient un peu car elles n'étaient pas habituées à  la ville, ni à  la foule. Les curieux descendaient dans la rue, car la "promenade" s'apparentait à  une fête de printemps

Elle passait par le marché Saint-Pierre, puis elle tournait autour de la place de Jaude avant de redescendre vers les abattoirs. Le lendemain, les bOeufs étaient abattus. A cette époque, les bouchers ne travaillaient jamais le vendredi saint. Mais la veille de Pâques, ils exposaient les quartiers de bOeuf dans leurs étals avec force publicité. D'une qualité supérieure, cette viande convenait parfaitement aux repas de fête de Pâques. N'oublions pas qu'elle marque la fin du carême qu'on appelait "le purgatoire des bouchers" en raison des interdictions alimentaires autrefois strictes. Interrompues pendant les deux guerres mondiales, la promenade du bOeuf gras existait à  Clermont-Ferrand au tout début du siècle, comme l'attestent les souvenirs de Jean-Pierre Poulet.

Les anciens lui en avaient fait le récit. Et avant ? Impossible de fixer la date de l'apparition de cette fête populaire, mais certains auteurs la font remonter à  des temps très anciens, peut-être même jusqu'aux traditions sacrificielles de l'Antiquité. Une seule certitude : au fil des siècles, elle a perdu ses particularités pour se banaliser, avant de disparaître.