La Fayette, nous voilà  !

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Ce portrait est paru dans l'Auvergne littéraire n°155, consacré à La Fayette par Pierre Balme.

Membre de la noblesse titrée, le marquis de La Fayette a siégé comme membre de l’Assemblée des notables, puis de l’Assemblée provinciale, première idée de nos conseils généraux. A Clermont, les réunions se déroulaient dans la grande salle du collège royal, l’ancien lycée Blaise-Pascal. Son hérédité, ses alliances familiales le rattachaient aux privilégiés. Il n’apparaît pas comme un leader d’idées hardies et subversives, déclare quelques louanges à l’égard du roi, mais avec la majorité du bureau, réclame l’élargissement du pouvoir des assemblées : une attitude complexe. Il est à l’origine de la suppression de la peine des galères pour les contrebandiers de la gabelle et de la restitution de l’intégralité de leurs droits civiques aux protestants. C’est lui qui demande au roi la convocation des Etats généraux.

La petite histoire veut que son parent Bouillé l’ait ainsi apostrophé: "Vous êtes content. Le roi cède un grand point !" et qu’il lui ait répondu : "Oh, nous le mènerons plus loin que ça". Selon certains, il n’aurait jamais cessé de soutenir la monarchie, mais à la manière anglaise : un roi, soumis avec son peuple à l’autorité d’une constitution.

Député de la noblesse lors des Etats généraux, il dépose immédiatement son projet de "Déclaration des droits de l’homme", inspirée de la déclaration américaine et proclamée le 2 octobre 1789. Dans la nuit du 4 août, il cesse de porter le titre de marquis et devient commandant général de la garde nationale. Il est le premier à déposer son épée sur la table sacrée et à jurer, pour le présent et le futur, fidélité à la Constitution issue de ses œuvres. Le roi et sa famille répétèrent à leur tour ce serment.

C’est l’apogée de sa carrière politique. Son attitude a constamment oscillé entre la fidélité au roi et le soutien des aspirations populaires. Sa vie est une suite d’événements en dents de scie : opposition avec les Jacobins, retour triomphal en Auvergne, commandement d’une armée dans le nord, asile en Allemagne après avoir été déclaré comme "traître à la patrie" par Robespierre, retour en France, refus obstiné de tout rapprochement avec Napoléon, apparition au balcon de l’Hôtel de ville à côté de Philippe d’Orléans, auquel il donne l’accolade républicaine et qu’il enveloppe du drapeau tricolore .

Mais auparavant, il aura fait un dernier voyage en Amérique et un ultime séjour de six semaines à Clermont en 1829. Jusqu’au bout, il a conservé la reconnaissance et l’amitié du peuple américain et de son président et bénéficié d’une popularité réelle auprès des Français, "consulté par tous les ministres et, ce qui vaut bien davantage, embrassé par toutes les femmes", avait-il lancé un jour dans un mouvement de belle humeur. "Honnête et loyal malveillant", insaisissable personnage, oui, mais modéré ? Est-ce bien certain ?